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ce qu'il faut savoir sur :

On le sait, on le sent, les pics provoquent un stress général chez les touristes comme chez les locaux : embouteillages, attentes interminables pour les locations, forfaits,  dans les commerces. Densité de skieurs trop importante avec les accidents qui augmentent en conséquence (donc les urgences aussi sont saturées). Ceci est difficilement quantifiable pour un économiste ou un commercial, je mettrais cela dans la catégorie  « baisse de la qualité de vie » dont je parlerai un peu plus loin.

 

Cependant, au-delà de ce « stress généralisé », ces pics de fréquentation et l’augmentation des infrastructures ont un impact financier direct. En effet, les réseaux bien que sous dimensionnés pour les pics, sont surdimensionnés le reste du temps. Et cela à un coût important qui est supporté par la communauté Tarine notamment, via les impôts locaux : réseaux plus long et plus gros pour les routes, l’électricité, l’eau potable, les eaux usées. Déneigement plus important, ordures ménagères qui augmentent significativement puisque ce type de structure génère un gaspillage important, notamment alimentaire. On peut estimer à 10% l’accroissement des ordures ménagères par exemple.

 

 

4.2 Augmentation de la vulnérabilité du tissu économique

 

On le sait notre force principale est également notre grande faiblesse : la monoculture touristique. [8]

On nous en parle depuis plusieurs décennies, la résilience de notre économie est très mauvaise. Même si pour le moment les bons résultats financiers sont là chaque année que se passe-t-il si par exemple, un début de saison très chaud empêche l’ouverture des stations pour la semaine du nouvel an (ce qu’il vient de se passer dans les Pyrénées cet hiver). Même avec nos fameux canons, ce scenario est tout à faible plausible dès demain. La semaine du nouvel an représente environ 10% du chiffre d’affaire de la saison des remontées. Sachant que la majorité des sociétés de RM de notre territoire appartiennent à la Compagnie Des Alpes (CDA), l’impact d’un tel début de saison ferait mettre un genou à terre de notre TBTF (too big too fail). Trois saisons d’affilés de ce type et je vous laisse imaginer quelles pourraient être les solutions drastiques engagées par la CDA.

Pessimiste diront certains, ce scenario est là pour mettre en lumière ce que tout le monde sait mais n’ose pas avouer : il est possible que ça commence à coincer dans les années venir. Qui plus est, sur le long terme il est probable que ce soit ce qu’il va se passer ; et ce long terme n’est qu’à quelques décennies de nous.

Poursuivre la fuite en avant nous engage toujours plus loin vers une position où il sera difficile de changer de cap. Cela nuit à notre capacité à mettre en œuvre une transition permettant d’augmenter la résilience de notre économie.

 

 

4.3 Destruction de l’environnement et des paysages.

 

Tout d’abord, rendre une zone naturelle de plusieurs hectares constructible n’est pas anodin. Ceci peut passer pour de l’écologie des « petites fleurs », qui est souvent discrédité face à l’argument économique, cependant la réalité des chiffres est là : Deux millions d’hectares de terres agricoles ont été perdus entre 1980 et 2010, ce qui représente la superficie cumulée des Landes et de la Gironde. Les sols artificialisés continuent depuis de s’étendre, avec 490.000 hectares perdus entre 2006 et 2014. Après un pic entre 2006 et 2008, leur progression se stabilise autour de 55.000 hectares par an depuis 2008. A ce rythme, c’est la surface d’un département tous les 10 ans qui est perdue. Les terrains artificialisés constituent désormais 9,3 % du territoire métropolitain, selon les données officielles. 

L’artificialisation des sols induit également une augmentation des risques d’inondations en aval. En effet cela en réduit la capacité des sols à absorber les pluies torrentielles, lors des épisodes de gros orages.

Participer ou non à amplifier ces phénomène devrait nous amener à avoir une vision politique différente de l’avenir.

 

 

Autre impact environnemental direct, et pas des moindres : la construction de ce genre de complexe. Les chantiers de cette ampleur sont réalisés par des très grosses entreprises du bâtiment qui sont par essence peu scrupuleuses concernant la protection de l’environnement. De fait, il est quasi systématique qu’elles ne respectent même pas les normes environnementales de base en vigueur en France. Celles ci sont vues comme trop contraignantes par les entreprises, et pas du tout assez contraignantes par les scientifiques en charge de limiter un peu notre impact sur la nature.

Dans les faits, l’exemple le plus courant est celui d’enterrer les déchets sur place, souvent dans les remblais et autre terrassement.

Les conséquences sont plus importantes qu’on ne l’imagine, les nappes phréatiques se retrouvent polluées pour de nombreuses décennies, et devinez qui boit l’eau qui en provient ?

 

 

La destruction du paysage est une autre conséquence de la création de ce type d’équipement. Il est clair que la notion de beau reste subjective, il vrai aussi que la philosophie nous invite à voir le beau dans chaque chose. Je ne peux cependant me défaire de l’idée que le Club Med des Arcs est laid (je manque probablement de philosophie). Il est laid comme beaucoup d’autres constructions en Tarentaise : qui soutiendra que Tignes est une réussite architecturale, Les Menuires une odes à la beauté de la nature, le paquebot d’Aime 2000 le résultat d’un subtile équilibre entre l’humain et son environnement ?

Quizz 2017.png

 Petit Quizz ayant fait le Buzz localement sur les réseaux sociaux

La logique des grands ensembles des années 70 a servi de modèle à la construction de nos stations (dites de 3ème génération). Aujourd’hui, même dans les pôles urbains on reconnaît que c’était une erreur, alors dans nos montagnes, admettons que nous avons tout bonnement saccagé les paysages. D’autres modèles de développement auraient probablement été souhaitables, ici n’est pas l’endroit pour faire le procès du passé mais parler d’avenir.

 

Pour le cas des Arcs, outre la défiguration du site avec cet énorme paquebot, un projet de « piste de retour » pour les clients par la forêt de Malgovert semble être dans les têtes de certains décideurs. C’est un des derniers sites naturels magnifique de la station qui risque d’être détruit, avec des arolles centenaires majestueux, dont un serait millénaire. Cela va sans dire que si ce projet se précise, une levée de bouclier devrait émaner de la résistance locale.

 

Concernant la Rosière, c’est un bâtiment de plus de 20m de haut (26m initialement prévus) et d’environ 50000m2 qui devrait voir le jour, alors que la Rosière avait réussi à ne pas trop exagérer sur la taille de son tissu bâti.

La question se pose sous cet angle : même si l’urbanisation des stations a souvent été une catastrophe pour le paysage, doit-on continuer à amplifier le phénomène ?

 

 

La question du beau, dont certains riront, est pourtant centrale dans les lieux touristiques. Notamment pour le tourisme estival.

Les anthropologues s’accordent à dire que la beauté est née avec l’humanité, c’est une des rares caractéristiques qui nous sépare des animaux. Perdre le beau c’est finalement perdre notre humanité.

Au delà des questions d’anthropologie et de philosophie, il est clair qu’enlaidir encore la montagne n’est certainement pas la bonne solution pour donner envie aux visiteurs de venir.  Je visite régulièrement d’autres régions des Alpes et suis toujours comblé de voir tant de beauté préservée à quelques dizaines de kilomètre de la Tarentaise.

Le Beaufortain et le Val d’Aoste, nos proches voisins devraient nous inspirer grandement au lieu de nous focaliser sur des indicateurs économiques tel que le nombre de journée-skieur qui ne reflète qu’une infime partie de ce qui se joue ici.

 

 

 

4.4 Baisse de la qualité de vie

 

Un autre désagrément que l’on peut évoquer est la baisse de la qualité de vie sur notre territoire. Cela passe inaperçu pour la plupart de nos proches car cela c’est fait progressivement et pourtant ses effets sont importants : stress induit par les pics de fréquentation, les diverses pollution (air, eau,…) engendrées, le pouvoir d’achat qui diminue, tout ceci contribue à une baisse importante de la qualité de vie depuis un peu plus de 30 ans en Tarentaise.

 

 

Certes nous avons construit et développer des infrastructures de plus en plus gigantesques, qui génèrent au global de plus en plus de profit. Cependant la qualité de vie était meilleure dans les années 80. Une famille avec un salaire médian pouvait se payer une maison ou un bel appartement dans le village se sont choix, l’air n’était pas pollué, les paysage était déjà abimé mais bien moins que maintenant (pensons à la zone commerciale désolante de la sortie de Bourg Saint Maurice,…)

 

Je n’approfondirais qu’un seul aspect : la baisse du pouvoir d’achat (pour prendre un mot à la mode). Cette baisse est très marquée à cause de la pression foncière qui règne sur le territoire. Le ticket d’entrée pour acheter ou faire construire une maison sur la commune de Bourg Saint Maurice est d’au moins 400'000 euros. Autant vous dire que si vous n’avez pas un (ou deux) gros salaire(s), ou un bien immobilier de famille, vous serez locataires le restant de vos jours. Tout le monde n’aspire par forcement à être propriétaire (ni même habiter une maison), mais en étant locataire, si vous n’avez pas une place à l’OPAC, les loyers étant très élevés dans la région, votre pouvoir d’achat est également amputé d’un beau montant. Cette tension accru sur le marché de l’immobilier n’est pas due uniquement au surdéveloppement touristique du territoire, mais c’est une des causes principales.

Les conséquences sont que les jeunes couples désirant s’installer, se déplacent vers le bas des vallées où les prix sont un peu plus accessibles. Cela augmente encore la circulation automobile avec des trajets pendulaires de plus en plus nombreux et surtout, cela diminue la vitalité sociale des zones les plus attractives. Moins d’habitants à l’année, des commerces qui tournent de moins en moins en morte saison, parfois jusqu'au moment où l'on ferme des classes.

évolution_effectif_scolaire_BSM.jpg

Effectifs scolarisés commune de Bourg Saint Maurice

Rappelons-nous quand même que, pour les populations locales de la Tarentaise-Vanoise, le développement touristique était conçu comme un moyen de pouvoir faire rester les enfants au pays en leur donnant du travail, à une époque où certains membre de la famille devait s’exiler faute de moyen de subsistance sur place.

En quelques décennies le pari a été réussi, et quelques décennies plus tard, le serpent se mord la queue, les enfants du pays doivent partir faute de pouvoir se loger (Val d’Isère, ou Courchevel sont les exemples types, Bourg Saint Maurice est en train de suivre la même tendance).

Cela ressemble  à un échec de politique locale cuisant.

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4.5 Augmentation de l’impact carbone

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Le point de départ de toute cette réflexion était que le projet actuel du Club Med de la Rosière est ce qu’il se fait de pire en terme d’émission de CO2 pour les besoins d’eau chaude sanitaire (au fioul), qui sont, rappelons-le, colossaux pour ce type d’équipement.

Un rapide calcul met en évidence environ 800 Tonnes de CO2 rejetés annuellement uniquement pour ce besoin du complexe.

Le Club Med souhaitant bien entendu avoir un retour sur investissement le plus rapide possible, il a évacué d’office les solutions renouvelables alors que celles-ci seraient tout à fait pertinentes pour ce type de projet (en particulier le solaire thermique).

J’imagine que si ces remarques sont entendus, le Club Med orientera peut être son projet vers quelque chose d’un peu moins impactant, mais cela se fera probablement sous l’égide d’un greenwashing bien orchestré, n’en doutons pas.

 

Il est une autre source d’émission de CO2, souvent ignorée par nos stations de ski : le transport des clients. On sait maintenant depuis une quinzaine d’année que pour une station, le transport pour arriver à destination, est responsable d’environ 80% de l’impact carbone du site ! Les sociétés de remontée, et les élus locaux appliquent la politique de l’autruche à ce propos et bottent en touche en expliquant que ce n’est pas vraiment dans leur périmètre d’action. C’est en parti vrai, on peut rejeter la faute sur notre bon vieux bouc émissaire : l’état français, tout autant inactif. Mais c’est également faux, la Tarentaise pourrait depuis longtemps permettre un report modal conséquent de ces clients, en répartissant pour moitié les départ/arrivée les samedis et dimanches en couplant cela avec des avantages et facilité pour les trajets effectués en train. Sans rentrer dans les détails, cela n’a que peu été appliqué. Dommage puisque cela aurait également diminué grandement certains pics dont nous parlions plus haut, mais ce n’est pas la question aujourd’hui.

 

Revenons à nos tridents : avec la montée en gamme des clubs, la clientèle cible n’est plus le bon français cadre supérieur, mais le très riche étranger. Le but du Club Med est donc de faire venir en masse Chinois, Brésiliens, Turques et consorts. Il est bien connu que les Chinois se déplacent à vélo et les Brésiliens adorent les caravelles pour traverser l’atlantique...

Petit calcul de coin de table : 1000 lits, 20 semaines complètes (c’est ce qu’affiche le club des Arcs cet hiver) donc 20000 clients. Quelles émissions de CO2 pour nos Gentils Membres :

  • Istanbul>lyon AR classe éco 1T

  • Istanbul>lyon AR 1ere classe 2T

  • Rio>lyon AR classe éco 4T

  • Pékin>lyon AR 1er classe 8T

 

Je vais être gentil avec nos GM, prenons une moyenne de 2T CO2 par client (il y aura bien quelques Français dans le lot)

On a donc un bas de fourchette de l’ordre de 40’000 Tonnes de CO2/ an pour notre joli complexe.

 

 

Ça ne vous parle pas ? C’est normal, les tonnes de CO2 ne sont pas très concrètes. J’exhume le plan climat énergie Tarentaise-Vanoise (voir plus bas), le bilan carbone du territoire nous donne un total de 2500 Kilo.Tonne CO2.

Pour nos GM c’est bien 40 Kilo.tonnes CO2 soit 1,6 % du total du territoire. Si on ne fait venir que des Pékinois en première classe on titille les 7% des émissions du territoire avec un seul projet. C’est co-lo-ssal, sachant que l’objectif est de diviser par 2 les émissions de CO2 dans la décennie qui vient et d’atteindre la neutralité carbone d’ici 30 ans…

Avec 5 nouveaux club sur le territoire en moins de 10 ans, on peut facilement avoir une augmentation de 30% de notre impact CO2.

Bilan GES TV.png

Seulement 15% des touristes viennent pour le moment en avion, et leur impact carbone représente déjà 30% de celui du territoire.

 

Vu sous cet angle, dérouler le tapis rouge au Club Med dans nos stations revient littéralement à couper la branche sur laquelle nous sommes assis en participant de façon proactive à l’augmentation du réchauffement climatique.

Il semble donc urgent de revoir nos stratégies commerciales sur le long terme ainsi que nos politiques locales de déplacement.

 

 

 

 

Nous avons donc fait le tour de quelques menus désagréments engendrés par le surdéveloppement touristique.

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La Grande Sassière, face Sud (Photo B. Roumier)

Sources :

 

[1] Cette brève histoire de la Tarentaise en issue en grande partie du livre de Y. Brêche et L. Chavoutier, Une vieille vallée raconte ses souvenirs, Petite histoire de la Tarentaise, aux éditions Xavier Mappus.

[2] Anouk Bonnemain, Quelle capacité d’adaptation pour les stations de sports d’hiver de haute altitude des Alpes du Nord ? [en ligne]. Openedition.org [Consulté en Janvier 2019] https://journals.openedition.org/soe/1055

[3] Agence PopRock, Tout le monde dehors [en ligne]. poprock-agence.com [Consulté en Janvier 2019]  http://www.poprock-agence.com/telechargez-lextrait-de-letude-monde/

[4] Rapport automne 2018 GIEC, en anglais [en ligne]. [Consulté en Janvier 2019] https://report.ipcc.ch/sr15/pdf/sr15_spm_final.pdf 

[5] ibid.

[6] Article France bleu [en ligne]. francebleu.fr [Consulté en Janvier 2019]   https://www.francebleu.fr/infos/climat-environnement/face-a-la-secheresse-la-station-de-la-clusaz-fabriquera-moins-de-neige-de-culture-cet-hiver-pour-1542126595

[7] Compte rendu des conférences [en ligne]. www.rencontres-meteo-montagne.com [Consulté en Janvier 2019]  http://www.rencontres-meteo-montagne.com/upload/tinymce/pdf/Compte-rendu-conferences-RCMM-2018.pdf

[8] Anouk Bonnemain, Quelle capacité d’adaptation pour les stations de sports d’hiver de haute altitude des Alpes du Nord ? [en ligne]. Openedition.org [Consulté en Janvier 2019] https://journals.openedition.org/soe/1055

[10]Page wikipédia Club Med [en ligne]. fr.wikipedia.org [Consulté en Janvier 2019] https://fr.wikipedia.org/wiki/Club_M%C3%A9diterran%C3%A9e

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